Identification

Il est possible de diffuser un contenu de manière anonyme. Néanmoins dans certains cas, l’identification des personnes est requise par la loi. Il est donc possible d’identifier des personnes anonymes.

 

  • Identification des éditeurs professionnels

Selon l’article 6 III de la LCEN, les personnes dont l’activité est d’éditer un service de communication au public en ligne doivent s’identifier en communiquant les données relatives à leur identité (nom, prénom, adresse, dénomination, numéro de téléphone etc..), celle de leur directeur de publication, ainsi que de leur hébergeur.

L’éditeur est professionnel lorsqu’il utilise son site à des fins commerciales. Mais il a été jugé que même une personne qui édite un site non commercial peut être qualifié d’éditeur professionnel :

Selon un jugement du Tribunal de Caen, les responsables d’un blog politique qui postent régulièrement du contenu (17 à 20 publications par mois) ont la qualité d’éditeur professionnel.  A ce titre, ils ne peuvent pas conserver leur anonymat sur leur site comme le prévoit l’article 6-III, 2 de la loi du 21 juin 2004 pour les personnes éditant à titre non professionnel.

Ils sont soumis à une obligation de mettre à disposition du public un certain nombres d’informations, prévue par l’article 6-III, permettant de les identifier (nom, prénom, adresse, numéro de téléphone etc…).

Le Tribunal fonde également sa décision sur l’article 14 de la LCEN qui inclut la fourniture d’informations dans le champ du commerce électronique, ainsi que sur l’article 19 de la LCEN obligeant à faire figurer sur le site un certain nombre d’informations d’identification. (TGI de Caen, 1ère ch. civ., jugement du 9 avril 2018)

 

  • Identification des éditeurs non professionnels

Selon l’article 6 III 2 de la LCEN, les personnes éditant à titre non professionnel un service de communication au public en ligne peuvent ne tenir à la disposition du public, pour préserver leur anonymat, que le nom, la dénomination ou la raison sociale et l’adresse du fournisseur d’hébergement, sous réserve de lui avoir communiqué les éléments d’identification personnelle prévus pour les professionnels.

Par éditeur non professionnel, il faut d’après la jurisprudence, entendre le fait de diffuser du contenu de portée personnelle limitée, à des internautes du cercle privé : familial ou amical. (TGI de Caen, 1ère ch. civ., jugement du 9 avril 2018)

A défaut, le risque est grand d’être qualifié d’éditeur professionnel.

Les hébergeurs sont tenus au secret professionnel, pour tout ce qui concerne la divulgation de ces éléments d’identification personnelle ou de toute information permettant d’identifier la personne concernée. Néanmoins, ce secret professionnel n’est pas opposable à l’autorité judiciaire. Il est donc possible de demander judiciairement la communication de ces éléments.

 

  • Identification des personnes ayant contribué à la création de contenu

L’article 6 II de la LCEN précise que les fournisseurs d’accès et d’hébergement doivent détenir et conserver les données de nature à permettre l’identification de quiconque a contribué à la création de contenu.

Ils doivent fournir aux personnes qui éditent un service de communication au public en ligne des moyens techniques permettant à celles-ci de satisfaire aux conditions d’identification prévues au III.

L’autorité judiciaire peut requérir communication auprès des fournisseurs d’accès et d’hébergement les données qu’ils détiennent.

Ces données sont listées par le décret n° 2011-219 du 25 février 2011 relatif à la conservation et à la communication des données permettant d’identifier toute personne ayant contribué à la création d’un contenu mis en ligne.

Ce décret prévoit également la durée de conservation de ces données : 1 an.

Ce qui nous paraît inadapté dans la mesure où l’on sait que la prescription de l’action en matière civile par exemple est de 5 ans….

Il arrive en pratique que les personnes ne puissent être identifiées en raison de cette durée.

Afin de permettre plus facilement la levée de l’anonymat, il apparaît par conséquent nécessaire d’allonger la durée de conservation de ces données.

 

  • Identification des commerçants en ligne

Selon l’article 19 de la LCEN, les personnes exerçant une activité de commerce en ligne doivent s’identifier.

Elles doivent communiquer toutes une série d’informations (nom, prénom, dénomination, adresse, email, téléphone etc…), permettant leur identification avec un accès facile à ces informations, direct et permanent, dans un standard ouvert.

Attention, il ne faut pas entendre par commerçant en ligne que les personnes qui font payer leur activité en ligne.

Le commerce électronique est défini par l’article 14 de la LCEN comme l’activité économique par laquelle une personne propose ou assure à distance, et par voie électronique la fourniture de biens ou de services.

Entrent également dans le champ du commerce électronique les services tels que ceux consistant à fournir des informations en ligne, des communications commerciales et des outils de recherche, d’accès et de récupération de données, d’accès à un réseau de communication ou d’hébergement d’informations, y compris lorsqu’ils ne sont pas rémunérés par ceux qui les reçoivent.

 

  • Sanctions

Le fait de ne pas s’identifier conformément à l’article 6 de la LCEN est sanctionné pénalement.

Selon la gravité de l’infraction, l’article 6 VI de la LCEN prévoit des peines pouvant aller jusqu’à un an d’emprisonnement et 250 000 euros d’amende.

– Dans une affaire, deux éditeurs ont été condamnés à 12 000 euros d’amende (6000e chacun) pour non-respect des mentions légales permettant leur identification, celle du directeur de publication et de l’hébergeur (Tribunal de grande instance de Paris, 17e chambre correctionnelle, jugement du 11 juillet 2014)

Il s’agit de la première condamnation pour non-respect des mentions légales.

– Dans une autre affaire, condamnation d’un éditeur à une peine d’emprisonnement de 3 mois avec sursis et 5000 euros d’amende pour non-respect des mentions légales (TGI de Paris, 17e ch. corr., jugement du 14 mars 2017)

 – Dans une dernière affaire, un ancien journaliste du monde intente une action en diffamation concernant des articles publiés sur le site d’un homme politique. Il informe le procureur de de la République du non-respect des mentions légales sur le site en question, mais sa plainte est classée sans suite. Il intente tout de même une action.

Le Tribunal constate que le nom du directeur de publication est manquant, et qu’une « telle désignation est pourtant nécessaire lorsque le directeur de la publication jouit de l’immunité parlementaire ». Le manquement à cette obligation constitue une faute.

Sur le préjudice, le tribunal considère qu’il résulte de l’impossibilité du demandeur à agir en justice.

Néanmoins, le préjudice doit se limiter à « l’impossibilité d’agir par la voie civile » et ne doit pas prendre en compte le préjudice de réputation, ou la longueur des délais de jugement.

L’éditeur est condamné à 1 euro de dommages-intérêts. (TGI de Paris, 17e ch., Presse-civile, jugement du 10 juillet 2019)

 

Pour aller plus loin :

Anonymat | Avocat internet | Arnaud DIMEGLIO (dimeglio-avocat.com)

 

Arnaud DIMEGLIO

Avocat à la Cour, Docteur en droit, Titulaire des mentions de spécialisation en droit de la propriété intellectuelle, droit des nouvelles technologies, droit de l’informatique et de la communication.
Bureau principal : 8 place St. Côme, 34000 Montpellier,

Bureau secondaire : 10 avenue de l’Opéra, 75001 Paris,
Tel : 04.99.61.04.69, Fax : 04.99.61.08.26

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